Les chiens noirs, c'est fini
Par Lien permanent
-Ce fut un long, un très long chemin. J’y ai croisé plein de gens, dont beaucoup avaient un sourire très beau. J’y ai emboîté le pas de quelques-uns.
Ce fut un chemin tâtonnant. Je l’ai commencé dans le noir, les mains devant. Et puis, à force d’user mes semelles et de me cogner dans les murs, j’ai fini par avoir envie de me rencontrer.
Un soir, je me suis aperçu, au loin, dans la brume et la nuit. Silhouette sans contours, d’abord. Silhouette parasitée, comme nos télés de jadis, quand le vent jouait avec l’antenne.
J’ai plissé les yeux pendant des années pour tenter de faire le point. Jusqu’au jour où je me suis vu un peu moins flou. Pour ça, je ne remercierai jamais assez xave d’avoir allumé la première bougie, il y a quinze ans.
J’ai entrepris de me rapprocher un peu de moi, mais ça m’a pris plus de temps que prévu. Il y avait tant de choses enfouies, oubliées, piétinées, ravalées. J’ai creusé, souvent à côté. J’ai tassé les remblais et arraché les masques, comme on retire un pansement. J’ai gratté les palimpsestes et balancé des coups de pieds rageurs dans les étais.
La première fois que j’ai voulu me redresser, ça m’a fait vachement mal, tellement c’était rouillé. Honnêtement, je ne pensais pas que ça prendrait tant d’années pour dégripper tout ce bordel.
Quand réalisé que j’avais fini de me déplier, je me suis presque déchiré les cordes vocales pour m’éclaircir la voix. En vociférant, je me suis entendu expulser des décennies de colère, de tristesse et de peur. Et puis, progressivement, j’ai retrouvé un timbre apaisé et je me suis vraiment raconté. Mais pas ici.
Ce fut un long, un très long chemin, dont ce blog a été parfois l’instrument, souvent le témoin. Un chemin qui n’avait qu’une seule fin : la permission d’être moi. Pas le moi douloureux et flou, couvert de masques et entortillé de brume que vous avez lu ici pendant deux décennies ; un moi nettement plus serein, avec qui j’ai plaisir à vivre. Celui qui sait dire “je”.
Même si le chemin est loin d’être fini, aujourd’hui, je vais mieux que bien. Mais la mue a été trop longue et trop douloureuse pour que j’aie envie de voir une chrysalide desséchée chaque fois que je me retourne. C’est pourquoi il est temps de dire au revoir aux chiens noirs, aux brols et au grenier. Merci à toutes celles et à tous ceux qui ont laissé des petits mots par ici. Merci pour les rigolades, les emportements et les encouragements. Merci pour la chaleur de vos bras réels ou virtuels, pour les jeux littéraires, les agendas idiots et les lianes infinies.
J’ai supprimé les commentaires, mais si vous avez envie de laisser un petit mot, vous pouvez le faire par là.
Merci, vraiment.
Arno